Extrait III – Audio Cassette

INITIATIVE MaliWatch : PREMIERE SESSION (*) DU 28 NOVEMBRE 1997 À D.C

Synthèse des Interventions – Extrait III : Audio cassette

(*) Session générale et session MaliWatch combinées
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– Mohomodou Houssouba Maïga : J’ai voulu parler du civisme en reconnaissant que, tout d’abord, c’est une notion qui peut causer beaucoup de confusion. Je crois que c’est la caractéristique des mots qui finissent en “isme” ! Je voudrais ici proposer une conception peut-être plus modeste, qui reflète mon état d’esprit ; je vais parler d’action civique.

De la façon dont je comprends la genèse de MaliWatch, c’est qu’il y avait des troubles, des rumeurs ou des réalités de [tentative de] coup d’état, qui a été déjoué, il y a un an ou quelque chose comme ça. Puis, c’est avec cette passion dans le ton que l’appel à la création d’une structure d’intervention, autour d’une pétition, a été lancé et cet appel s’est soutenu avec la détérioration politique durant la période électorale. Donc, je crois que nous avons commencé avec un début un peu réactif ; nous réagissions à des événements qui se passaient au Mali. Nous n’étions pas vraiment au courant de ce qui se passait, mais je crois que ce volet doit encore continuer puisque, comme on le disait, nous sommes encore en transition démocratique au Mali. Nous devons continuer à réagir aux événements qui se passent au pays.

Mais, il nous faudrait aller au delà de ça. Je crois que nous pourrons approfondir durant les débats. Pour moi, ce qui serait très important à long terme, c’est de déterminer un rôle spécifique en tant que maliens de l’extérieur ou bien amis du Mali vivant à l’extérieur – (le bruit d’une scieuse altère la qualité audio de l’enregistrement(.

Nous devons intervenir auprès de nos représentants, de nos états, de nos provinces, aux États-Unis, au Canada ; nous devons être un conduit ou un réseau d’information qui aide à élever le profil du Mali pour les investissements, pour la recherche, pour la promotion touristique, etc. Nous devons aussi être une banque objective d’informations sur les obstructions au Mali, sur les problèmes politiques et autres. Je crois que nous sommes obligés d’assumer les devoirs et les droits ; et comme c’est paradoxal de dire qu’on doit être obligé d’assumer ses droits, de réclamer ses droits !

Parce que nous avons des droits vis-à-vis de nos politiciens, de nos dirigeants, de notre système étatique et diplomatique. Nous avons des devoirs ; oui, nous devons nous acquitter de ces devoirs ; je crois que nous avons commencé ici, à un état embryonnaire ; mais, je crois que nous avons entamé le chemin.

Pour les points en détails, je vous demande de vous référer aux deux pages que j’ai fait circuler. Je voudrais faire le survol ; je sais qu’il me reste quelques minutes. Mais, je vais passer rapidement pour qu’on ait plus de temps pour la discussion. Ce que j’aie comme “and” tout, c’est un avertissement pour dire que quand on parle du civisme, de ne pas tomber dans le moralisme public. Nous avons un devoir d’être informés, d’être concernés par les événements qui se passent au Mali, en tant que citoyens ou amis du Mali. Nous devons avoir au moins deux voies d’action. … (bruit de scieuse( ! À cours terme, quand nous répondons avec des pétitions, et à long terme, quand nous avons une méthode de créer de la connaissance, de faire de la recherche, de trouver des données que nous pouvons rendre disponibles auprès des maliens ou de ceux qui sont intéressés par le Mali ; que ce soit aux États-Unis, au Canada ou en France. Nous devons créer un domaine de communication et c’est pour ça que je suis nerveux quand on me parle de politiser le discours de MaliWatch. Je pense que, dans une démocratie, le discours politique est un peu éternel (rires) !

Donc, il faut s’attendre à ce qu’il y ait de la politique. Mais, il faut aussi s’attendre à négocier et, quand un rapport sort au nom de MaliWatch, que ce soit une décision consensuelle. Cela ne veut pas dire que mon point de vue ne serait pas différent de celui d’Iba ou bien de quelqu’un d’autre ; parce que, moi, je ne suis pas apolitique ; je suis politique ; très politique ! Je suis non-partisan ; je me crois objectif le plus souvent ; mais, je ne suis pas apolitique. Mais, il y a des gens qui sont apolitiques. Je ne suis pas neutre ! Je crois que je vais être impartial, objectif ; mais, je ne suis pas neutre. Je vais prendre une position quand je crois que c’est juste ! Nous aurons cette différence, mais je crois que nous devons négocier. Il faut faire la distinction entre les points de vue individuels et les points de vue collectifs. Je vous remercie.

– Mariétou Macalou: Merci, la parole est à Bakary.

– Bakary Sylla : Concernant le volet politique et administratif, je vais prendre mon propre cas pour illustrer le problème. Le fonctionnement de l’État malien, je n’ai pas une grande idée là-dessus. Et je sais que c’est le cas pour la plupart d’entre nous. Pourtant, je suis sûr que parmi nous, dans la salle, il y a des gens qui ont une certaine connaissance du domaine ; des spécialistes qui peuvent nous aider à voir comment l’État même fonctionne. Parce que, pour nous, il s’agit même de connaître ce que nous avons ; analyser, si vous voulez, l’État malien. Ensuite, nous pouvons identifier les besoins et aider efficacement. L’administration de l’État n’est pas claire dans la tête de tout le monde ; je suis le premier exemple.

Le fonctionnement de l’État ; il y a les trois pouvoirs : le pouvoir politique, le pouvoir judiciaire et … Bon, il y a les trois pouvoirs quand même (rires) !

– Mariétou Macalou : L’exécutif, le législatif et le judiciaire.

… Bakary Sylla : Oui, merci ! Le fonctionnement de ces trois pouvoirs; généralement, ce n’est pas très clair ; on fait des assomptions là-dessus. Pour MaliWatch, un des volets sera de nous informer sur des choses de ce genre, de bien les comprendre et d’informer les autres maliens. Il faut mettre les spécialistes à contribution et ensuite ventiler les informations sur ce qui se fait au Mali et comment ça se fait.

Un autre problème concret, c’est les actions quotidiennes de gestion de la vie publique. Par exemple, le maire de Tombouctou était là ; il était à Tempi, en Arizona. J’ai causé avec lui. Il me dit qu’il a été invité par la ville de Tempi pour revenir dans trois mois ; mais, qu’il ne peut pas, parce qu’il faut l’autorisation du gouverneur. Un maire élu, pour se déplacer, a besoin de l’autorisation du gouverneur désigné ! Et ça, c’est l’État démocratique malien et on nous parle de décentralisation. Je me demande à quel niveau est cette décentralisation ? Ce sont de petits problèmes comme ça qui sont en train de ronger la société. On ne se rend pas compte ; on ne cherche pas à les déceler et à les résoudre. Donc, il faut qu’on réagisse par rapport à des problèmes de ce genre. Il faut même voir s’il faut toujours désigner les gouverneurs ; quels sont leurs pouvoirs par rapport aux élus ? Et si on parle de décentralisation, de démocratisation, je pense qu’il faut s’attaquer aux structures de parti unique sur lesquelles, en ma connaissance, l’État malien fonctionne toujours. Tout revient au même point. Je sais qu’il y a une commission de décentralisation ; il faut évaluer le travail de cette commission et voir comment nous pouvons faire des propositions impartiales pour accélérer les choses.

Mon autre point, c’est quoi ? C’est que nous avons fait à l’extérieur. Nous savons comment les sociétés américaines, asiatiques, européennes et autres marchent. C’est une chance ! Est-ce que nous allons gaspiller cette chance là, en ne montrant pas chez nous tous les aspects de ces sociétés là ?

… (La Présidente fait mention du temps imparti.)

… Bakary Sylla : Oui, je n’ai que quelques minutes (rires) ! Donc, cette chance là, pour nous maliens de l’extérieur, c’est aussi de prendre les meilleurs aspects de ces sociétés et de les répliquer chez nous. Nous avons besoin de coordonner cela et MaliWatch va aider avec ça. Alors, nous pourrons faire un impact de qualité dans la société malienne. Bon, je m’arrête là, merci !

… (Bruits de fond !)

– Mariétou Macalou : Je crois qu’on va ouvrir les discussions pour
couvrir ce volet là ; n’est-ce pas ? OK, vous pouvez y aller.

– Nouhoun Bane : Je crois que Bakary avait demandé comment fonctionnait l’État malien. S’il veut, je peux leur dire un peu ce qui est et ce qui devrait être.

– Bakary Sylla : Quand je parle d’explication de la manière dont les institutions fonctionnent, d’accord, tu peux y aller peut-être ; mais, je prendrai contact avec toi pour avoir plus de détails après. Car, MaliWatch, ce sera un groupe qui va venir aux spécialistes et quand nous aurons assez d’informations, nous pourrons commencer à les ventiler.

… (Bruits de fond !)

– Harouna Maïga : Priorité aux dames !

– Aïssata Sow Thiam : Enfin, moi, j’ai une réaction. Je suis vraiment fière d’être [inaudible] savoir tout d’abord [inaudible] …

– Madame Maïga a [inaudible] … C’est à propos de la crédibilité. Vous voulez être un groupe d’observation [inaudible] … une structure qui pourrait [inaudible] – vos interventions [inaudible].

[N.B: Iba a relevé de ses notes personnelles que Madame Thiam se déclarait fière de compter parmi les participants ; qu’elle était heureuse de voir une telle mobilisation et qu’elle était impressionnée par le dynamisme des organisateurs. Ses questions étaient relatives à deux points cruciaux :
1) Comment les initiateurs de MaliWatch entendaient asseoir la crédibilité de cette nouvelle organisation (problèmes de sources d’information, de leur fiabilité, du mécanisme de large distribution à mettre en place) ?
2) Comment serait financé MaliWatch (coûts opérationnels, budgets pour les différents projets) ?

– Abdoul Sylla : Je voulais rappeler que les deux fois ou MaliWatch a eu à envoyer une pétition sur Bamako, le texte était représentatif des opinions exprimées sur Malinet. Le débat sur Malinet était, en fait, est-ce qu’il y a eu “tentative de” coup d’État ou le gouvernement avait fait une machination ? On n’a pas eu à dire qu’il y avait “tentative de” coup d’État ou pas, mais on a condamné l’idée même de recourir à des méthodes pareilles. Donc, ce n’est pas pour dénigrer ou accepter toute information qui vient, mais trouver un consensus dans le débat.

La première pétition, c’est Bakary qui a eu à la rédiger. On a débattu certains points, rejeté d’autres. Quand même, la pétition qui est partie sur Bamako était claire sur le fait que nous rejetons carrément l’idée même qu’il puisse avoir un coup d’État au Mali ; qu’il faut qu’on dépasse ce stade là. Mais, on n’a pas pris partie pour une source d’information ; pour dire oui, il y a eu “tentative de” coup d’État ; non, il n’y a pas eu “tentative de” coup d’État. Le débat n’était pas centralisé sur l’information; il est toujours très difficile de savoir alors où se trouve la vérité ! Souvent même, il n’y a pas de vérité (rires) !

Donc, l’idée même de MaliWatch, ce n’est pas de discuter de l’information, mais de la possibilité qu’il puisse y avoir certaines choses. C’est de condamner ou pas certaines possibilités. À mon avis, la pétition qui a été envoyée a donné satisfaction à tout le monde, malgré les différences à propos des sources d’information.

Donc, je pense que si nous gardons ce modèle en tête, nous pourrons atteindre notre objectif. Sinon, les sources d’information même, ça va toujours être difficile, selon qu’on utilise la presse étatique ou la presse de l’opposition. Ce qui est important, c’est d’être objectif, d’être neutre peut-être, mais de dire ce que pense le groupe comme étant la vérité consensuelle. Je crois que c’est comme ça quoi !

… (Bruits de fond – la Présidente donne la parole à Harouna Maïga ;
Abdoul présente ses excuses pour avoir pris la parole avant Harouna(.

– Harouna Maïga : Oui, j’avais demandé la parole avant ! Pour moi, il ne s’agit pas seulement de “you know”, critiquer ce que le gouvernement fait de bon ou de pas bon. On doit faire ça. Mais aussi, en tant que groupe, on doit pouvoir dire au gouvernement, au Mali, aux maliens, voilà ce qu’on peut faire pour ce pays là … On a parlé de politique.

Pour moi, je me fiche éperdument de qui est au pouvoir ; mon problème, c’est de pouvoir aider le pays. Par exemple, au niveau politique, on peut se demander, est-ce que les maliens comprennent le sens de la constitution du Mali ? Est-ce que nous, on peut faire quelque chose pour expliquer la constitution du Mali ? Est-ce qu’on peut s’investir pour expliquer l’hymne national du Mali ? Quel est notre rôle, par exemple, dans l’éducation de l’armée ?

Parce que si on parle de coup d’État, c’est parce que l’armée se sent un peu détachée de la société ; l’armée n’est pas intégrée à la société malienne. L’armée se voit comme une force organisée qui peut faire des coups d’État. Comment est-ce qu’on peut faire un effort d’éducation pour amener l’armée à comprendre qu’un militaire est comme un malien ordinaire ? Je crois que c’est des choses comme ça qu’il faut faire.

Il faut des résultats, comme Ousmane l’a dit ; il ne s’agit pas de parler ; il ne s’agit pas de dire, bon, il y a des crises ; ils ont creusé des puits à Tombouctou ; ils ont fermé et on ne peut pas ouvrir parce que le gouvernement malien veut des taxes ! Sur des situations comme ça, on doit prendre une position claire et nette. Et dire, bon, peut-être qu’il y a des textes ? Moi, je ne comprends pas cette situation, qu’une organisation, une ONG, aille au Mali sans passer par les autorités gouvernementales ! Je suis sur qu’il y a des textes là-bas. Et s’il n’y a pas de textes, il faut les créer.

– Abdoulaye Doucouré : Je crois que ce cas là, c’est Bakary qui l’avait mentionné sur Malinet ; n’est-ce pas Bakary ?

– Bakary Sylla : Oui, oui! Mais, ce n’est pas la peine de …

– Harouna Maïga : Non, j’ai pris un cas comme ça ; c’est un exemple. Il faut avoir un programme ; c’est ce que je veux dire. Voilà ce qu’on va faire pour le Mali ; sans dire que c’est l’ADEMA qui est au pouvoir, parce que c’est l’ADEMA, donc on ne va pas faire … Ou bien, c’est le CNID qui est au pouvoir et parce que c’est le CNID, on ne va pas faire … On doit être neutre dans cette position ; on doit avoir notre vision politique ; on va prendre notre position ; ce qui est juste est juste ! C’est des choses comme ca qu’il faut faire au niveau politique. Au niveau social et économique, je crois que je vais intervenir quand on va arriver à ce point là.

. . .[d’autres extraits vont suivre].
—————————– Pour la Coordination Générale, Iba N’Diaye. —————————–